Une tribune signée par Thierno Abdoulaye DIALLO, Directeur de Publication du journal Africa Supply Chain.
Depuis le 23 août 2021, la Direction Générale des Douanes du Sénégal a introduit une nouvelle taxe dénommée Programme de Modernisation de l’Administration des Douanes (PROMAD). Cette dernière de 3% s’applique aux marchandises, d’origine tierce à l’Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA) et à la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), déclarées pour la mise en consommation sous le régime du droit commun.
Alors que cette taxe est qualifiée par certains acteurs logistiques comme une de trop et d’autres comme une bonne nouvelle, le temps est-il peut-être venu de se poser ces questions : quel est réellement le rôle l’Administration des Douanes dans le développement de la Supply Chain au Sénégal ? Quelle est la performance de l’administration douanière dans les opérations logistiques ?
La dématérialisation des procédures douanières devrait être accélérée
Appliquer une taxe de 3% sur les marchandises d’origine tierce à l’’UEMOA et à la CEDEAO, pour moderniser l’administration douanière est une bonne chose en soi si on sait que cette dernière doit se moderniser pour faire face aux défis mondiaux de la Supply Chain.
En effet, la Direction générale des Douanes sénégalaises s’est engagée depuis 2010 dans un processus de dématérialisation des procédures et formalités du commerce extérieur avec ses systèmes d’informations appelés GAINDE et ORBUS.
Ces derniers permettent de faire la déclaration en ligne et de joindre tous les documents qui l’accompagnent. Ils intègrent aussi l’ensemble des acteurs qui interviennent dans la prise en charge de la cargaison qui disposent chacun d’un module connecté aux opérations et transactions. Le circuit douanier se fait désormais par voie électronique et le « vérificateur » a accès aux déclarations.
Néanmoins, force est de reconnaître que le chemin est encore long comparé à d’autres pays comme le Maroc, les Emirats Arabes Unis ou Singapour où la dématérialisation des procédures douanières est totalement complète avec un guichet unique de paiement : avec le besoin de se déplacer uniquement au port ou à l’aéroport que pour prendre livraison de la marchandise.
Il faut une Administration Douanière au service de la Supply Chain et du Consommateur final
Le plus grand problème de la Douane sénégalaise réside à notre avis dans le manque de formation de ses agents surtout opérationnel dans le Management de la Supply Chain.
En effet, nous pensons que les agents douaniers n’ont pas assez de notion en termes de Supply Chain car ils raisonnent rarement en termes de coûts et délais. C’est peut-être, ce qui nous pousse à dire qu’ils ne sont pas conscients du rôle très important de la Douane dans la chaine logistique. Ils font seulement focus sur les recettes fiscales oubliant ainsi le rôle de l’entrepreneur ou du consommateur final dans le développement économique et social du pays.
Certains détails qu’on minimise parfois comme : décharger une cargaison en pleine expédition parce qu’on la suspecte, retarder un camionneur pour des formalités qui ne lui incombent pas, négliger ou traiter lentement un dossier de transit pour x raisons, ont un impact fort négatif dans l’optimisation de la Supply Chain et sur l’économie d’un pays.
D’ailleurs, la Douane constitue l’une des faiblesses du Sénégal selon les critères de l’Indice de Performance Logistique (IPL) de la Banque Mondiale qui classe le pays à la 28ème place en Afrique, avec une notre de 2,25/5 pour le critère efficacité du système de dédouanement.
C’est dans ce sens que la nouvelle taxe, PROMAD, pourrait être une bonne nouvelle pour les acteurs de la Supply Chain si elle est utilisée à bon escient.
En effet, elle devrait permettre à notre avis l’amélioration de la formation des agents de la douane pour une meilleure compréhension des enjeux mondiaux de la Supply Chain car l’administration douanière est un maillon essentiel de cette chaine et qu’elle se trouve dans chaque pays.
Or, les marchandises passent obligatoirement dans un bureau de douane que ça soit par voie maritime, aérienne ou terrestre : d’où sa position stratégique.
Dans un monde en perpétuel changement avec la Covid-19 qui a explosé le e-commerce, maîtriser la Supply Chain est un levier stratégique de performance inestimable pour développer économiquement un pays et l’Administration douanière n’a pas le droit de déroger à cette règle.
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