Impact des changements climatiques sur les infrastructures de transport en Afrique
Par Ibrahima DIALLO
10 mai 2024 / 09:20

                                           Article publié dans le Magazine nº11 Africa Supply Chain 

Les changements climatiques ont un impact dans toutes les régions du monde. Températures élevées, sècheresses, incendies, érosion des sols, élévation du niveau de la mer et des côtes, perturbation de la biodiversité, baisse de disponibilité en eau douce sont autant de conséquences qui ont une grande incidence sur de nombreux aspects de nos vies.

En présentant le rapport sur l’État du climat en Afrique 2022 lors du dernier Sommet Africain sur le climat, le secrétaire général de l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM), Monsieur Jukka Petteri Taalas indiquait que « l’Afrique est responsable de moins de 10% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Or c’est le continent qui est le moins à même de faire face aux effets délétères du changement climatique. » En effet, l’Afrique est l’un des continents les plus vulnérables aux effets des changements climatiques, et ses infrastructures de transport ne font pas exception.

Quelles sont les conséquences du changement climatique sur les infrastructures de transport en Afrique?

Des routes aux voies ferrées en passant par les ports maritimes et les aéroports, ces infrastructures sont confrontées à une série de défis croissants en raison des conditions météorologiques de plus en plus extrêmes. Le rapport « Enhancing the climate resilience of Africa’s Infrastructure: the roads and bridges sector » sorti en 2016 par la Banque Mondiale indiquait déjà « qu’en Afrique, la hausse des températures, l’augmentation des précipitations et les inondations finiront par avoir raison d’un réseau routier déjà soumis à une pression extrême ».

En effet, les pluies torrentielles de la saison des pluies provoquent souvent des glissements de terrain et des inondations, endommageant gravement les routes et rendant difficile l’accès à certaines régions. Cette vulnérabilité du réseau routier s’étend également aux voies ferrées victimes des tempêtes et inondations.

Les infrastructures de transport ferroviaire, assez développées dans les pays comme le Nigéria, sont souvent exposées aux dommages causés par celles-ci, ce qui entraîne des interruptions du service et des retards dans le transport des passagers et des marchandises.

Les ports maritimes côtiers ne sont pas en reste devant les effets dévastateurs du changement climatique. Ils font face à l’érosion côtière ainsi qu’aux inondations résultant de l’élévation du niveau de la mer qui compromettent la navigation et les opérations portuaires. Le Programme du Littoral Ouest-Africain de la Banque mondiale renseigne dans un de ses rapports en 2019 qu’environ 56% des côtes du Bénin de la Côte d’Ivoire du Sénégal et du Togo s’érode à un rythme moyen de 1,8 m/an.

Enfin, les aéroports en Afrique sont également touchés par les effets des changements climatiques notamment les tempêtes, vents violents et vagues de chaleur. Ces derniers affectent la performance des avions et la sécurité des passagers.

Les contrecoups climatiques provoquent ainsi la détérioration des infrastructures de transport entraînant par là des perturbations sur la circulation des biens et des personnes. Ces dégradations physiques ne sont pas sans avoir des coûts sur l’économie des pays africains, coûts étant liés à l’interruption des chaînes d’approvisionnement, des productions ou à la limitation de l’accès à certains services.

Le rapport du Conseil Exécutif des Transports Urbains de Dakar (CETUD) sur les externalités négatives du transport dans la région en 2021 indique que la pollution atmosphérique et les émissions de gaz à effet de serre constituent 63% des pertes de l’économie sénégalaise – estimées à un montant annuel de 900 milliards – du fait des dysfonctionnements du système de transport.

D’autres coûts liés aux besoins de réparation ou de remise en état des infrastructures de transport sont également à considérer pour pallier le défaut de sécurité et de fiabilité à la suite des différentes intempéries. D’après le Centre Africain pour la politique en matière de climat de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique, les coûts des pertes et dommages dus au changement climatique en Afrique sont estimés entre 290 et 440 milliards de dollars sur la période 2020-2030.

Il semble ainsi important que des mesures soient prises pour renforcer la résilience des pays africains face aux phénomènes climatiques extrêmes et/ou pour atténuer leurs conséquences sur leur productivité économique et plus particulièrement dans le secteur du transport.

Quelles actions pour faire face aux impacts du changement climatique sur les infrastructures de transport en Afrique?

Avoir des infrastructures de transport adéquates et fiables est une condition essentielle au développement économique et social de l’Afrique. Le Rapport de l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) sur la situation économique et sociale du Sénégal en 2019 énonce que « le secteur du transport occupe une part importante dans les politiques publiques. » et que « la richesse créée par les services de transport contribue à hauteur de 2,1% du Produit Intérieur Brut (PIB) en 2019 ».

En Afrique du Sud, le secteur des transports contribue à lui seul à hauteur d’environ 6,5% du PIB en 2023. Selon un rapport de Mordor Intelligence, une firme internationale qui effectue différentes études et analyses sur les tendances du marché mondial, le secteur du transport est un contributeur clé à la compétitivité de l’Afrique du Sud sur le marché mondial.

Étant donné la part non négligeable qu’ont les infrastructures de transport dans l’économie des pays africains, il apparait impératif que les décideurs investissent dans des systèmes qui permettront d’adapter les nouvelles infrastructures de transport et de modifier celles qui existent déjà pour en renforcer la résilience climatique. Il ne s’agit pas seulement de réhabiliter et de moderniser mais surtout de prendre en compte ces éléments lors des phases la construction et pendant l’entretien des infrastructures à titre préventif.

Une autre mesure préventive consiste à renforcer les moyens de surveillance du climat et de prévention des impacts pour mettre d’agir efficacement avant certains effets dévastateurs du climat. Lors du Sommet africain sur le climat, un plan d’alerte précoce pour tous en Afrique a été lancé car selon le secrétaire général de l’OMM :

« les observations météorologiques sont très lacunaires en Afrique et les services d’alerte précoce sont terriblement insuffisants. Nous sommes bien déterminés à combler ces lacunes et à faire en sorte que tout le monde puisse recevoir des alertes précoces salvatrices ».

Enfin les pays africains peuvent également soutenir les mesures de résistance contre les chocs climatiques sur les infrastructures de transport en engageant des politiques de croissance verte pour contrer les répercussions des émissions de gaz à effet de serre.

Cela signifierait la promotion de l’utilisation des ressources naturelles et donc d’énergies renouvelables, la réduction des déchets et de la consommation d’énergie qui sont autant de dispositions peuvent avoir des effets positifs sur le climat. Les infrastructures de transport en Afrique sont confrontées à des défis croissants en raison des changements climatiques, ce qui compromet leur efficacité et leur durabilité à long terme tout en engendrant des coûts et pertes non négligeables.

Des mesures d’adaptation et d’atténuation sont nécessaires pour renforcer la résilience de ces infrastructures face aux événements météorologiques extrêmes et aux phénomènes climatiques en évolution, contrer les impacts des changements climatiques et assurer un développement durable et résilient sur le continent.

Oulématou CAMARA : Professionnel en Supply Chain

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