Conteneurs : des résultats financiers en corrélation avec le marché
Par Ibrahima DIALLO
1 septembre 2023 / 09:13

Selon Container Trade Statistics, les volumes échangés de conteneurs dans le monde enregistrent une baisse de 3,6%. Pour les principaux armements conteneurisés, la baisse de trafic est plus conséquente avec un impact significatif sur les résultats financiers.

Le marché de la conteneurisation atterri. Après une année 2022 de forte croissance, le premier semestre affiche une baisse conséquente des trafics pour se retrouver à un niveau légèrement supérieur à celui de 2020. Selon les derniers chiffres publiés par Container Trade Statistics, les exportations de conteneurs dans le monde s’établissent à 55,3 MEVP. Un trafic en baisse de 3,6% par rapport à 2022. Depuis 2021, les chiffres semestriels ne cessent de perdre du volume.

Les volumes perdent de 3 à 7%

Ce contexte de baisse du marché de la conteneurisation se répercute directement dans les résultats des armements au premier semestre. En effet, de Mærsk Line à Yang Ming en passant par CMA CGM et Hapag Lloyd, tous les armateurs voient leurs volumes transportés se réduire. Ainsi, CMA CGM et Hapag Lloyd ont pu contenir cette diminution de volumes. Pour leur part Mærsk et ONE subissent un impact plus fort. Alors, avec une baisse des volumes, les chiffres d’affaires des armateurs enregistrent aussi des baisses conséquentes. Elles s’établissent toutes avec des taux à deux chiffres.

Baisse des taux de fret

Outre la baisse de la consommation dans le monde, le retour à des taux de fret bas impacte les revenus des compagnies maritimes. Les armateurs annoncent une baisse importante des taux de fret. Pour Mærsk, la baisse des taux de fret atteint 44,4% à 2 651 $/EVP. Il s’agit d’un taux de fret moyen des différentes lignes assurées par le groupe. Pour Hapag Lloyd, cette baisse moyenne est plus faible à 38,3% à 1 761$/EVP.

Les deux principales routes est-ouest (Asie-Europe et Transpacifique) affichent des baisses de taux de fret de plus de 50% comparativement au premier semestre 2022. Quant à Cosco, il rapporte que le Shanghai Containerized Freight Index a perdu 69,3% de son volume. Cet indice détermine les taux de fret au départ et à destination de la Chine.

Une économie de la logistique en berne

Tous les armateurs s’accordent à reconnaître la dégradation de l’économie mondiale sans peindre un tableau trop pessimiste. « Les volumes ont commencé à baisser dès l’automne 2022. Nous savions tous qu’après les deux années de croissance, nous retournerions à un marché plus raisonnable », a souligné Rolf Habben Jansen, président directeur général d’Hapag Lloyd. Une position partagée par le pdg du groupe CMA CGM, Rodolphe Saadé.

« Malgré un rebond de la demande de transport au deuxième trimestre 2023 par rapport au premier trimestre 2023, porté par une certaine résilience macroéconomique, et la baisse des prix de l’énergie, le marché du transport et de la logistique reste en berne. »

Des marchés qui résistent

Malgré tout, cette situation générale doit être nuancée. Ainsi, en Méditerranée, les volumes ont réussi à se maintenir au cours de ce semestre. « Les trafics sur l’Europe du Nord n’ont pas été aussi faibles que nous l’attendions. La distribution voit ses ventes se maintenir », indique Thorsten Meincke, membre de la direction Air and Ocean de Schenker AG, lors d’une conférence de presse organisée par Hapag Lloyd. Et le Pdg de l’armement allemand confirme cette tendance en rappelant que sur le Transatlantique le marché est resté solide. « Nous voyons, aussi, les premiers signes d’un retour d’activité sur le Transpacifique. »

Les lignes Nord/Sud résistent

Et cet optimisme, Rodolphe Saadé le partage sur les lignes Nord/Sud. « Les volumes sont restés soutenus », confirme le pdg du groupe CMA CGM. Dans son détail des taux de fret, Hapag Lloyd note que les lignes taux de fret des lignes vers l’Afrique perdent 30,8% à 1760$/EVP. Quant aux taux de fret pour les lignes sur l’Amérique du Sud, ils se contractent de 28,2% à 1913 $/EVP.

Hausse des coûts d’exploitation

Cette diminution des revenus s’aggrave avec la hausse des coûts d’exploitation. En effet, l’augmentation du prix de l’énergie pèse sur les résultats opérationnels. De plus, une partie de la flotte mondiale passe sur des soutes alternatives comme le GNL. Or, outre le coût liées aux adaptations techniques des navires, ces soutes sont d’un coût plus élevé que le traditionnel IFO.

La révolution environnementale

En effet, l’industrie du transport maritime entame sa révolution environnementale. Les armements ont le choix entre l’adaptation des navires aux nouvelles normes environnementales ou l’acquisition de nouvelles unités. Pour le Pdg de Hapag Lloyd, Rolf Habben Jansen, le volume du carnet de commandes est à un niveau élevé. « Cependant, nous ne sommes pas dans la même situation qu’en 2019 quand le carnet de commandes atteignait un niveau semblable. En effet, nous devons adapter les navires aux règles environnementales. Il nous faudra donc envoyer plus de navires à la démolition. »

Un besoin en nouveaux navires

Et cette analyse du futur doit aussi être mis en perspective avec les nouvelles conditions de marché. « Nous voyons de nouveaux navires arrivés sur le marché dans un contexte de ralentissement de la vitesse des navires. Pour opérer le même nombre de ports en opérant à une vitesse réduite, il est mathématiquement obligatoire d’avoir de nouveaux navires », a continué Thorsten Meincke.

L’Arabie Saoudite, un marché en devenir

Et l’avenir ? Sur le court terme, pour Hapag Lloyd et Schenker, les marchés à regarder avec attention sont, en premier lieu, la Chine. « La Chine va revenir à ses niveaux d’avant », soutient le directeur de Schenker. L’Inde doit aussi devenir un terrain de croissance.

Parmi les marchés outsiders, Thorsten Meincke souligne que l’Arabie Saoudite pourrait prendre une position intéressante dans les prochains mois. Les changements politiques en cours dans le pays sont susceptibles de s’accompagner d’une croissance économique. Pour le Pdg d’Hapag Lloyd, il faut ajouter à cette liste la totalité du continent africain. Il estime que la logistique maritime devrait enregistrer « une croissance au-dessus de la moyenne » dans la région.

Hervé Deiss

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