Par Ibrahima DIALLO
24 mai 2023 / 07:31

Les pertes annuelles de conteneurs en mer se sont établies à 1 566 unités entre 2008 et 2022 mais avec une moyenne de 2 301 unités ces trois dernières années. Défauts d’arrimage, de fixation, d’emballage, fret mal déclaré, piles toujours plus hautes… l’OMI est toujours attendue sur ces sujets.

« La baisse du nombre de conteneurs perdus en mer en 2022 est une bonne nouvelle mais chaque conteneur perdu en mer sera toujours un conteneur de trop », admet facilement John Butler, le président du World Shipping Council (WSC), qui tient à jour depuis 2011 cette singulière comptabilité. Seul à faire référence à ce jour sur ce sujet bien que reposant sur des informations renseignées par ses membres armateurs, qui représentent toutefois plus de 90 % de la capacité mondiale des porte-conteneurs.

Le rapport 2022 fait état de 661 conteneurs passés par-dessus bord. Des données à toutefois regarder avec une profondeur de champ. D’après la base de données du WSC, il y a eu en moyenne 1 382 conteneurs perdus en mer chaque année au cours de la période de 12 ans (2008-2019) par les 6 000 porte-conteneurs en service.

La tendance s’était améliorée entre 2017 et 2019 avec une moyenne de 779 unités mais les coups de houle dans les eaux agitées du Pacifique en 2020 et 2021 ont porté à 3 113 le nombre de boîtes passées par-dessus bord. Analysée sur une période longue, les pertes annuelles en mer se sont établies à 1 566 unités entre 2008 et 2022 mais avec une moyenne de 2 301 unités ces trois dernières années (2020, 2021, 2022).

Un taux de pertes de 0,00026 %

Sachant qu’il y a actuellement 250 millions de boîtes vides et emballées à bord des 6 597 porte-conteneurs pour une valeur de plus de 7 000 Md$, « cela représente moins d’un millième de 1 % », se défend le WSC. Toute moyenne cache des disparités et cette littérature ne fait pas exception. Il suffit parfois d’un événement pour la faire exploser. Aussi épisodiques, les événements sont suffisamment impressionnants pour qu’ils aient une rémanence.

Ainsi, au cours de la période 2011-2013, il a « suffi » du naufrage du MOL Comfort (2013), mémorable incident avec la perte de 4 293 conteneurs et un coût de 440 M$ pour le P&I Club au titre des cargaisons, et de l’échouement et perte totale du Rena (2011), avec ses 900 boîtes, pour quadrupler la moyenne triennale qui l’a précédée : de 675 à 2 683.

De même, la série frappant quelque ONE (Aquila et Apus), se matérialisant pour ce dernier par une chute de 1 800 conteneurs, ainsi que le Maersk Essen (quelque 750 conteneurs) ont fait date dans l’accidentologie du conteneur.

Sinistralité largement documentée

Dans un rapport, le Standard Club, un club de P&I, a fait le point sur les facteurs de risques sur la base des retours d’expérience. Les défauts d’arrimage et de fixation (les boîtes sont fixées à l’aide de verrous aux quatre coins tandis que des barres d’arrimage sont ensuite utilisées pour river les piles de conteneurs au pont) mais aussi d’emballage ou encore le poids mal déclaré reviennent souvent dans la liste des principaux facteurs identifiés par les rapports d’accidents.

Fret mal déclaré

Parmi les facteurs aggravants figurent en effet les conteneurs dont le poids est mal déclaré, que ce soit par erreur, méconnaissance ou volonté délibérée (pour obtenir des taux de fret inférieurs, les matières inertes n’étant pas facturées au même prix que les dangereuses).

Pour y pallier, l’OMI a modifié la règle 2 du chapitre VI de la convention SOLAS en 2016 afin d’exiger la vérification du poids des conteneurs avant le chargement des conteneurs à bord des navires, Le chargeur étant de ce fait  tenu de fournir la masse brute vérifiée (MGB) en l’indiquant dans le connaissement. Il doit ensuite la soumettre au capitaine ou à son représentant pour être intégrée dans la préparation du plan d’arrimage du navire.

Le fret mal déclaré n’est pas sans incidence. Les conteneurs sont positionnés dans le navire de façon à garantir l’équilibre et à minimiser les risques selon leur poids (les conteneurs les plus lourds au bas de la pile et les plus légers au sommet), leur dangerosité (la cargaison classée placée à l’écart des quartiers de l’équipage, des cuves de carburant et des autres marchandises dangereuses), leurs besoins en énergies (conteneurs frigorifiques raccordés à l’électricité), les escales à venir…

Défaut de contrôle

L’armateur ne peux que se fier aux déclarations du client, les marchandises étant emballées avant qu’elles ne parviennent sur le navire de l’armateur ou chez le transporteur. ONE, victime ces dernières années de retentissants épisodes, a annoncé l’an dernier qu’il passait à l’amende pour un poids incorrectement renseigné sur le trafic Asie-Europe en direction de l’Ouest.

À tous les niveaux, le défaut de contrôle est probant. Bien que les dispositifs d’arrimage et de fixation soient agréés par classe, ils ne sont généralement pas inspectés par une société de classification. Le remplacement des équipements non conformes aux normes relève donc de la responsabilité de l’équipage d’un navire.

Des piles qui s’allongent

Le gigantisme des navires inquiète également dans la mesure où les mastodontes de dernière génération sont capables d’aligner 24 rangées de conteneurs dans le sens de la longueur et d’empiler jusqu’à 24 conteneurs, 12 dans les cales et 10 à 12 en pontée, offrant à pleine charge, une forte prise au (mauvais) vent. Soumises à de grands franc-bord, les piles « agissent comme des voiles géantes ».

Du côté des armateurs, le WSC a lancé en 2021 le projet Marin Top Tier dont l’objet était d’approfondir les connaissances pour établir des lignes directrices afin de prévenir les incidents, notamment en élaborant de nouveaux outils (estimation des risques, calculateurs…), former en conséquence aux risques (les types de roulis paramétriques) et à la gestion des situations dangereuses.

L’arrimage en cours d’optimisation ?

Des recherches sont actuellement menées sur les dispositifs d’arrimage. « Alors que le projet entre dans sa troisième et dernière année, d’autres résultats sont attendus sous la forme de meilleures pratiques industrielles, de normes de sécurité actualisées et de recommandations », indique aujourd’hui l’organisation.

Sur le plan réglementaire, le huitième sous-comité du transport des cargaisons et des conteneurs de l’Organisation maritime internationale (OMI), qui s’est tenu du 14 au 23 septembre 2022, a notamment validé des propositions d’amendements aux conventions Solas et Marpol qui prévoient de rendre obligatoire la déclaration de pertes de conteneurs.

Après avoir été soumises à l’approbation du Comité de la sécurité maritime (MSC107), elles pourraient être adoptées par le MSC108 à l’automne 2023 pour une entrée en vigueur avant le 1er janvier 2026.

Cette mesure était très attendue bien qu’elle paraisse secondaire au regard de ce qui est unanimement admis comme une plaies des mers avec les incendies.

Adeline Descamps

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